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Situation

[Guyane] En vue des cotes guyanaises- France [Partie 1/2]

Le 11 Mai 2004  | 05°00 N 52°00 W | [Imprimer] |






Nous quittons le Sénégal par la porte de la Casamance, cap sur l’Amérique. Cela fait quelques jours que nous préparons cette transat : rangements, nettoyages, vérifications. Nous pensons à chaque instant à cette traversée. On nous en a tellement parlé. « Ah oui, tel bateau a fait une semaine de moteur, il avait pétole (bon aller, on prend deux bidons de gasoil en plus). Un autre a traversé en quinze jours, sans faire de quart ni de veille. Pas de problème, il n’y a personne. » Les histoires de fortunes de mer vont bon train : tempête, attaque de baleines, rencontres plus ou moins fatale avec un cargo, un container ou des pirates. Le témoignage de Patrick et Noëlle du bateau Utopie nous laisse songeur : « la difficulté est dans la longueur, on en ressort différent ». Nous voilà sortis de la passe de Djifer, la nuit est tombée, nous réalisons à peine que nous nous lançons pour le traversée de l’Atlantique. Cela fait des semaines, des mois que nous y pensons, lisant et relisant les cartes et les instructions nautiques sur la meilleure route à suivre. Nous imaginons des scènes de la traversée, répétant mentalement le largage du radeau de survie, le ramassage des poissons volants sur le pont au petit matin, la phrase que nous déclamerons en voyant la silhouette de la première terre…
Nous mettons le cap au sud du Cap Vert, avec un vent de travers pour ensuite mettre le cap sur la Guyane avec des vents et courants porteurs. Nous prenons le rythme des quarts, chacun trois heures dehors pour veiller sur les cargos, le vent, la mer et ne pas manquer un lever ou un coucher de soleil. Notre principale activité est de dormir, sinon, nous nous reposons et nous mangeons. Après quatre jours de mer, nous ne sommes pas encore bien amarinés et descendons un minimum à l’intérieur, juste le temps de cuire des pâtes ou faire un point. Nous assistons simplement à notre traversée.
Avec une moyenne de 130 miles par jour, nous reportons notre position sur la carte et regardons admiratifs, perplexes, pensifs, rêveurs notre route se dessiner et ce qui reste encore à parcourir. Avec le compas, nous calculons : ce soir, nous avons fait 1/3 de la route (apéro), nous venons de faire 1000 miles (apéro), il ne nous reste plus que 1000 miles (apéro). Notre réserve de jus d’orange en prend un coup ! (nous ne supportons pas d’alcool en navigation mais le pineau des Charente nous attend à terre !). 30 avril : 10 nœuds de vent portant, mer belle, nous sortons notre arme secrète : deux bambous de 6 mètres achetés à Ziguinchor en Casamance. Nous les fixons de chaque coté du mât et avec un système de poulie, nous envoyons deux génois tangonnés en ciseaux. Maloya est tiré par un gigantesque papillon blanc qui ondule au rythme de la houle. C’est beau, ça marche et c’est génial ! Nous sortons les cannes à pêche. Ce midi, pommes de terre sautées dans la graisse de canard avec du jambon cru. Nous profitons maintenant de la traversée et nous avons plaisir à être là, au milieu de l’océan. Nous avons même les dauphins et quelques oiseaux qui viennent nous rendre visite de temps en temps. 1er mai. Sur Maloya, pas grand chose, nous apercevons notre premier cargo à l’horizon et nous pêchons une petite dorade coryphène. Ce soir c’est pizza, nous la mangerons demain. Par contre pour les européens, c’est une date importante avec l’entrée de dix nouveaux pays. Nous suivons toute la journée les débats et infos sur RFI. Nous écoutons beaucoup la radio en traversée, pour la météo et pour les infos et reportages. Nous avons beaucoup de plaisir à suivre l’actualité des pays traversés. Les embruns et les alizés sont chauds, la mer est agitée et les vents toujours portants. Les jours défilent et nous admirons chaque jour la lune se lever avec un quartier de plus. Plus que cinq nuits de quart. Nous avons hâte d’arriver. Nous nous racontons l’un l’autre ce que sera notre escale guyanaise, les différents emplois que nous pourrons faire (c’est l’occasion de faire autre chose !), notre bateau idéal, ce que nous ferons dans les dix prochaines années. Il faut dire que nous avons le temps de cogiter et chaque jour se dessine un nouvel avenir. Les miles, les livres et les quarts défilent. Nous sommes par 6°N et 48°W, le pot au noir approche (zone de calmes et de grains entre les systèmes anticycloniques des hémisphères nord et sud). Petite pluie de temps en temps qui se transforme en une bonne averse voire une douche chaude. Avec le vent arrière, le cockpit et la descente sont vite inondés. Repli stratégique à l’intérieur, nous confions le bateau au pilote automatique seul. Nous faisons ainsi connaissance avec le pot au noir : pluies, soleil, chaleur humide, pas de vent, rafales, averses… Nous changeons souvent les voiles, en passant en un quart d’heure de génois et grand voile haute à trinquette seule. Cette navigation sous les latitudes équatoriales n’a pas que des désavantages et nous profitons d’une bonne averse chaude pour sortir le Tahiti douche (sans les palmiers) suivi d’un bain de soleil. Notre dernière nuit a été fatale pour le vit de mulet (articulation entre la bôme et le mât). Sous une brusque rafale, le pilote ne réagit pas suffisamment rapidement et la grand voile empanne brusquement. Annabel est à la barre et Hervé, vêtu des ses seuls chaussures et harnais, affale la grand voile et amarre la bôme désarticulée sur le pont. La voile est un peu décousue, mais pour le moment, il fait nuit noire et la pluie est battante, nous verrons cela demain. A l’approche des côtes, nous slalomons dans une armada de bateaux de pêche, de la petite barcasse aux gros chalutiers. Tous s’affairent à pécher la crevette dans de grands filets qu’ils traînent entre deux grand bras. Il est difficile de discerner leur route, leurs feux de navigation sont mélangés aux spots de pont et ils changent souvent de direction, faisant des allers retours ou de grands cercles. Enfin la terre ! Elle se dessine après une bonne averse, lorsque la mer cesse de fumer et les nuages remontent à leur altitude habituelle : deux îles montagneuses plantées de cocotiers, comme dans les récits de pirates. Premières balises en vue, nous pénétrons sur le fleuve Mahury, bordé de palétuviers et d’une végétation plus qu’abondante. L’eau est marron jaune et les cris d’oiseaux ne manquent pas. Nous longeons le port de commerce de Dégrad des Cannes (un des plus chers du Monde pour décharger les conteneurs) et nous nous amarrons au ponton d’une petite marina, juste au bord de la mangrove.

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